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15 novembre 2009 7 15 /11 /novembre /2009 17:15
 

Peu après avoir mis ce blog en ligne, j'avais écrit un article traitant de la difficulté de se choisir un nom. Au fil de mes pages j'ai même pu poser la question de la valeur du nom d'un écrivain, en tant que moteur d'appréciation de son œuvre; un moteur qui peut parfois mener à des emballements peu compréhensibles, ou refuser obstinément d'atteindre son bon régime. Dans le premier cas nous pourrions citer des auteurs à la mode. Dans le second, l'échec du Chantecler de Rostand après le formidable triomphe de Cyrano. Je posais même la question de l'auteur anonyme, étant bien entendu que cette suggestion ne vaut que par l'éloignement temporel ou géographique entre le lecteur et l'auteur.

 

Idée farfelue? Non point, car la littérature regorge de pseudonymes qui sont des pseudo-anonymes. Mais de là à ce que le gouvernement suive mes idées jusqu'à les appliquer aux Cv, les fameux curriculum vitae, dont il faudrait retirer tous les identifiants légaux, il y avait un pas que je n'osais franchir. Enfin devraient sortir les décrets d'application de cette bonne justice! Et j'ose espérer qu'ils n'en resteront pas à ce banal cas d'espèce. Un peu d'envergure, que diable! 

 

Enfin, les lettres anonymes seront appréciées à leur juste valeur. Affûtez vos plumes; les corbeaux! Le grand temps des réglements de compte et de conte est revenu. Enfin la France profonde pourra se remettre à l'ouvrage sans craindre de représailles gendarmesques, et sans même la basse excuse d'une quelconque guerre avec un pays voisin, ou d'une brave dénonciation aux services fiscaux. Point besoin d'attendre une nouvelle vague menaçante de poudre blanche pour s'offrir le plaisir d'une petite enveloppe farineuse mal charbonnée.

 

Je n'avais même pas pensé à quel point les lignes de mon petit blog avaient porté. Il paraît que les futurs candidats à l'élection présidentielle seront anonymes. Terminé l'affichage des grands sourires sur les panneaux 4x3, oubliées les leçons de maintien, envolés les cours de gestuelle neuro-linguistique. Car on ne s'en tiendra pas au floutage de la tête. Imaginez un débat télévisé entre Chirac et Sarkozy, je veux dire entre C... et S... (pardon, l'habitude...). C'est toi le grand, c'est moi le petit... Il faut un anonymat parfait, une déformation canardesque des voix, un bip masquant les tics verbaux. Plus de « écouteeeeez », ni de « travailleurs, travailleuses », encore moins de « casse-toi pauv'con ». Enfin le vrai sens redonné au discours débarrassé de ses affûtiaux.

 

On s'y fera. Parce que l'anonymat dérange un peu au début. Une impression désagréable de perte d'image, une sorte de descente du piédestal. Mais ne serait-ce pas un début d'esprit démocratique? César enfin mêlé à la foule sans crainte d'un quelconque Brutus. Mais il y a des avantages. Imaginez le titre d'un grand journal du soir: Monsieur J.S. président de l'E. Point final. Que de tracas évités, que de conflits dépassés, que de portes ouvertes dans la pénombre de l'anonymat!

 

J'imagine cependant qu'il doit bien y avoir un revers à cette médaille. Je ne parle pas des films classés X qui pourraient convenir ainsi aux modernes patronages, s'il en existe encore. Je parle des employeurs attardés, rétrogrades, peut-être pire encore, quatre-vingt treizistes, domicilistes, lieu de naissance-istes, ethnistes pour tout dire, qui pourraient voir (deviner plutôt) derrière cet anonymat, une sorte de capuche obstinément relevée, pire encore un modèle de burqua d'embauchage dont le président N.S. vient de nous affirmer... Quoi donc? Qui veut la parole?

 

Madame, dans le fond. Ah oui, la burqua, c'est pour éviter de se faire discriminer, parce que personne ne peut savoir si vous êtes blonde ou brune. C'est logique. Je n'y avais pas pensé, mais je cède à la logique. Je ferai remonter en haut lieu, puisque ces lignes ont l'heur d'y trouver quelque écho.

 

Je rentre chez moi sans tarder pour y penser.

Qui a sifflé?

Pardon Monsieur l'agent. Vous dîtes? Cinquante et un à l'heure? Je ne me rendais pas compte. Vous voulez... mes papiers. Je croyais...

 

 

 

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  • Pierre-François GHISONI
  • la littérature en partage
L'homme avant les termites
L'idéal sans l'idéologie
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