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2 mars 2010 2 02 /03 /mars /2010 12:48

 

Cet article pourrait porter en sous-titre : choquer pour convaincre?

 

En effet nous l'avons entendue jusqu'à plus soif, cette justification du pauvre, présentée de façon bénigne au mode interrogatif pour mieux en dissimuler le caractère malin, ainsi qu'on qualifie certaines tumeurs.

 

Une auditrice d'une radio en trois lettres posait en interrogation que peut-être, par manque de moyens financiers, l'agence BDDP aurait été contrainte d'utiliser cette approche. Bigre! Quelle meilleure démonstration de la validité de mes articles précédents? Car chacun sait bien, si les moyens manquent, fouiller dans son imagination et son expérience pour trouver les outils nécessaires. Alors, quelles expériences et quelles imaginations se sont exhibées! Merci Madame, d'avoir montré du doigt la profondeur de l'égoût.

 

Mais je préfère revenir aux bases des prétendues justifications : choquer pour convaincre?

 

Tout d'abord, poser la question ainsi, c'est tomber dans le piège de la mauvaise foi, en éliminant les autres hypothèses de travail. Si l'on pose : quelles sont les meilleures méthodes pour entraîner la conviction et la modification des comportements, le discours et les pratiques changent, s'enrichissent. Ils prennent une autre tournure, au lieu de se vautrer dans une "tournante" des consciences.

 

Ensuite, il faut oser raisonner plus clairement, conformément aux données de la psycho-physiologie : il est prouvé que la mise en mémoire est facilitée par l'émotion, mais il n'est nullement prouvé que cette mémorisation s'accompagne d'un accord de comportement, d'une adhésion au message censé être véhiculé. Au contraire, on observe des mécanismes de défense menant à des comportements d'adhésion perverse, de provocation agressive, de dérision stérile, voire de rejet global mettant en péril les acquis des réflexions prélables. Tous ces phénomènes étant d'autant plus forts que le message est plus brouillé, ce qui est le cas qui nous préoccupe.

 

Et des gens qui ont voulu choquer pour convaincre, il y en eut, et bien avant que BDDP ne cherche à les singer. La petite histoire du tabac qui rejoint la grande est particulièrement éclairante, en actes choquants pour convaincre.

 

Dès 1498, le gentilhomme Rodrigo de Jerez est condamné à dix ans d'emprisonnement pour avoir fumé dans une rue de Catalogne. Mourad IV de Constantinople condamnait les fumeurs civils à avoir les pieds et le mains coupées, les soldats bénéficiant d'un traitement de faveur : seuls le nez et les lèvres l'étaient. Aprés l'incendie de Moscou (1634), le tsar condamnait les fumeurs à avoir le nez coupé. L'empereur de Mongolie Jehangir, grand opiomane, condamnait les fumeurs de tabac à mort.

 

Oui mais ces temps sont révolus me dira-t-on (mécanisme de défense bien connu, accompagné de l'indignation vertueuse de circonstance).

 

Alors rapprochons-nous d'un site de témoignage contemporain sur l'Algérie, dont je cite le passage (les internautes curieux pourront ainsi le retrouver)

 

 

"Dans l’Est du pays, entre Barika et Aïn Touta, je m’étais rendu après l’indépendance, en compagnie de Abdelhamid Boudiaf (oncle de « Boudi », Mohammed le président assassiné) et lui même ancien moudjahid, sur les lieux où était tombé mon frère en 1961. Engagé dans la lutte depuis la mi-55, il était vers la fin chargé avec son groupe mobile du harcèlement des premiers convois ferroviaires de pétrole de Biskra à Bougie, qui passaient entre les premiers contreforts de l’Aurès et les monts Hodna. L’un des paysans qui l’avaient connu me confiait toute l’angoisse des siens, chaque fois qu’un officier de l’ALN, faisant halte dans leur douar ou se dirigeant vers la Tunisie, les plaçait devant un dilemme devenu leur cauchemar. Il leur demandait du tabac, alors que quiconque violait à ce moment là le boycott du tabac (même à chiquer ou à priser, trahissant moins son usager) risquait d’avoir le nez coupé ou de se voir ôter la vie. Il me dit le nom d’un de ces officiers avec qui il avait joué sa vie à pile ou face."

 

Ceux qui en douteraient encore devraient retrouver les images de ces atrocités commises par différents groupes (ALN, FLN) souhaitant "persuader" leurs coreligionnaires de ne pas fumer.

 

Choc garanti, dégoût assuré et résultat nul.

 

À bon publicitaire, salut!

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  • Pierre-François GHISONI
  • la littérature en partage
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L'idéal sans l'idéologie
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