Je ne pose pas ma candidature, mais:...
p 23: Avec cette impression de faire une chose qui n'est pas bon pour moi...
p 43: Je crains qu'un événement si fort soit-il ne pourra jamais bousculer un homme dans ses habitudes.
P 43: Je me demande quand a-t-il su qu'il ne retournerait plus jamais en Haïti et qu'a-t-il senti à ce moment là?
P 85: Je descends dans la rue pour un bain dans ce fleuve humain où plus d'un se noient chaque jour.
P 100: Elle est enfermée dans sa chambre et refuse d'ouvrir à personne.
P 101: C'est pas son genre de parler d'elle
P 134: Quand est-ce que vous avez compris que l'enfer que nous venons d'évoquer n'est pas pour vous?
P 176: Le rire de ces beautés d'un soir dans la nuit parfumée permettront à ce jeune tigre en chasse de les repérer aisément.
P 192; C'est pas si facile que cela d'être au même endroit que son corps.
P 195: On est montés dans ma chambre afin que je me change.
P 244: Au bout de la route on a trouvé un petit hôtel tout bancal où c'était possible de souper.
P 245: On s'est arrêtés à cette guinguette près de la mer.
P 257: Juste avant d'atteindre... on s'est arrêtés à Miragoâne.
Ces perles recueillies dans le nouveau tirage de novembre 2009 ne me donnent aucune envie d'acheter le premier pour un exercice stérile de comparaison. Il suffit!
Je ne me pose pas en correcteur mais en lecteur, et je me dis que les éditions Grasset se fichent du monde. Entre la coquille inévitable et la casse industrielle il y a un monde qu'un éditeur véritable ne devrait pas franchir. J'ai cru reconnaître dans cette accumulation la trace d'un correcteur orthographique semblable à celui dont j'ai démasqué les méfaits il y a peu (voir mon article « le correcteur corrigé »). Si je me trompe, c'est pire pour la qualité des correcteurs humains.
J'ajoute que le tiré à la ligne institutionnel n'est pas de la poésie, quoi qu'on en crie. C'est tout simplement de la vente de papier qui gonfle l'apparence d'un bon texte jusqu'à lui donner celle d'un bon(?) livre.
Car le texte de Dany Laferrière est bon. Non pas sublime, mais bon, riche d'images et de réflexions dont la véracité s'impose. Il est même astucieux. Il nous donne envie de mieux connaître cette peinture haïtienne dont j'aime à dire qu'elle développe un baroque tropical qui cache sous ses formes l'exubérance de secrets vivants, vaudou, peut-être, ou autre pensée que j'aimerais mieux connaître. Il a l'intelligence de ne pas nous bassiner outre mesure avec le discours officiel du « tout-esclavagisme » néologisme aussi laid dans son expression qu'historiquement faux. Il essaie intelligemment de trouver une explication à la poussée dictatoriale de l'ex-président Duvallier en le considérant, étudiant possédé de ressentiment, dans son poème Les Sanglots de l'exilé. Il ouvre des pistes sur la vie des livres, des lecteurs et des écrivains, et j'aime qu'il expose cette figure tutélaire, qui, « barbu plein de fureur et de douceurs, au milieu d'une meute de chiens, tente d'écrire le grand roman américain... le seul, aujourd'hui, qui sache danser avec les fantômes, les fous et les morts ». Nous partageons l'admiration pour ce grand auteur qu'est Victor-Lévy Beaulieu.
Je pourrais écrire « bien des choses en somme » sur ce texte de Dany Laferrière. Mais si j'étais à sa place, je serais furieux, d'une colère de forte nature. Je serais furieux de ces fautes de français insupportables. Je serais furieux de cette bonne prose dévergondée en pseudo-poésie de bas étage, sous prétexte de rejet à la ligne. Je serais furieux, de cet article de Pierre-François Ghisoni qui pose la question du véritable travail entre l'auteur-étalon et l'éditeur-cavalier. Et si cette colère ne devait retomber que sur l'auteur de ces lignes, elle signerait alors l'aveu d'une belle faiblesse, un nouveau duvalliérisme littéraire d'auteur ou d'éditeur.
L 'énigme du retour... de flamme?